dimanche 23 avril 2023

Absolument Débutant Face à d'Incertains Vents

"Ouin mais Jones, Bowie y est pas gay ?"

Nooooooon. Et même si il l'était, est-ce que ça fait de moi un homosexuel ? Est-ce que c'est même important de le savoir ? 

Mes amis ne comprennent pas. Ne comprennent pas mon intérêt pour Bowie. Assez rapidement, ils le découvrent assez musicalement fameux eux aussi. Mais penchent davantage vers des compilations. Qui pleuvent depuis que DeFries n'est plus autour. Je n'ai pas encore acheté ma première cassette de Bowie. J'achètes assez peu, depuis 1 an. Pas besoin. Je prends chez le voisin d'en face tout ce qui me plait, les vendredis soirs ou les samedis matins, en 33 tours, et lui ramène sur l'heure du souper. Je recopie ce qui me tente sur des cassettes vierges et ça me suffit. Je ferai encore ça 3 ans et demi. Mon apprentissage du monde de la musique rock. Mon Spotify avant l'heure. 

Julian Temple a un film en cours qui rend hommage à la fin des années 50, adapté du roman de Colin MacInness de 1959. Pour sa trame sonore, il demande à David de composer la pièce titre. Bowie lui propose en retour de tourner le clip de sa chanson de près de 8 minutes. Dans le style des années 50. Bowie jouera aussi le rôle de Vendice Partners dans cette comédie musicale au succès discret. Je crois qu'il n'est même pas lancé en salle, en Amérique du Nord. Il compose aussi une seconde chanson pour une scène et s'inspire du riff de guitare de Material Girl de Madonna, chanson qui est alors # 1 dans le monde. Bowie s'inspire de ce qui est dans le vent, ne le souffle plus tellement. Il enregistrera aussi des versions italienne de Space Oddity et une version allemande de Love You Til Tuesday. Bowie, père de famille, apprend le repassage. Il enregistre aussi une version de Volare pour Absolute Beginners

Bob Geldof ex-chanteur irlandais des Boomtown Rats, après Band Aid en novembre 1984, prépare maintenant un giga concert qui sera appelé Live Aid, qui réunira de partout dans le monde via sattelite, technologie nouvelle pour 1985, peu importe là où les artistes se trouvent, les meilleurs artistes du moment, et dont les fonds iront aux besoins africains. Bowie voudra en être assurément. On voudra que Bowie et Mick Jagger chantent en duo via satellite une chanson en promotion du live Aid de Juillet. Bowie au Wembley Stadium et Jagger, en tournée, du John F.Kennedy Center de Philadelphie. Mais la technologie satellite offre quelques secondes de délai, ce qui empêche toute forme de coordination des voix. 

On choisit alors la chanson de Martha & The Vandellas, Dancing in the Streets, pour non seulement faire la promotion du Live Aid, mais aussi pour la première journée mondiale de la danse à travers le monde. Bowie fignole les derniers mix d'Absolute Beginners en y ajoutant la voix magique de la soeur de son guitariste, Kevin Armstrong, Janet. Jagger l'y rejoint en studio, en Angleterre et 4 heures plus tard, la chanson en duo est finalisée. On tourne le clip dans la même nuit où rien n'est réellement coordonné sinon l'idée de mettre deux grandes icônes de la musique en duo, en duel de chant et de danse. En 13 heures on offre un hit pour les radios. En Angleterre la chanson sera la 6ème plus vendue de 1985. 


Quand le Live Aid a lieu, le 13 juillet, Queen vole le spectacle.Encore aujourd'hui, dans les centres sportifs, on reprend la ritournelle de Freddie Mercury d'alors qui fait répéter à la foule ses Hey Ho! et tout ce qui suit. Bowie est prévu tout de suite après sur scène. Il n'est pas intimidé par l'immense foule galvanisée par Mercury, mais plutôt par la randonnée en hélicoptère pour s'y rendre. En effet, c'est l'unique moyen de la faire les rues d'Angleterre étant un trafic immonde ce jour-là en raison du giga-spectacle. Il n'y a pas si longtemps, il ne prenait même pas l'avion et là, il devait s'y rendre dans ce cercueil à hélice ? Une fois rendu, il joue dans l'ordre TVC15, Rebel Rebel, Modern Love et Heroes. Son band improvisé comprend Thomas Dolby aux claviers et Kevin Armstrong à la guitare. Ainsi que deux choristes féminines. C'est un grand moment prolongé de ce que Queen avait préparé déjà en triomphant un peu avant. 

Plus ou moins confus sur la direction musicale à prendre par la suite, c'est vers le cinéma qu'il se tourne. Il est adjoint à un projet en marche depuis 1983 de Jim Henson, George Lucas et le Monty Python Terry Jones. Bowie est fan des trois. Mais dès qu'il joint le film en cours d'écriture, ce film change de ton. On le voulait plus léger que The Dark Crystal, dernier projet de Henson, mais Terry Jones verra "son" film peu à peu lui échapper. Bowie, dans le rôle de Jareth, Roi des Goblins, chantera. Mais David trouve les quelques 20 versions de scénario, sans grand humour. On lui suggère alors de le rendre plus drôle lui-même. Mais le résultat convainc à moitié. Elaine May est engagée pour polir tout ça. Labyrinth réorienté vers les plus jeunes, sera un bon succès après 25 réécritures et 4 ans de travail. 

Mais avant tout ça, John Schlesinger tourne une adaptation du livre d'espionnage racontant une histoire réelle, The Falcon & The Snowman. Il demande à Pat Metheny  de composer un morceau pour son film. Metheny a un morceau instrumental sur lequel Bowie posera sa voix et ses mots. Il voit le film, s'en inspire, et livre This Is Not America, qui est, selon moi, un de ses plus beaux morceaux. La collaboration est parfaite. Quand Bowie suggère au band de Metheny de faire les voix arrières, personne ne se sent habile pour le faire. Bowie les fera alors toutes, usant de voix différentes entre 6 et 7 fois, surimposées. 

Jimmy T. Murakami adapte en film d'animation, le roman graphique de Raymond Briggs When The Wind Blows, originalement publié en 1982. Le film raconte l'histoire d'un couple âgé survivant à une attaque nucléaire. Erdal Kizilçay est dans l'oeil de David. Il travaille souvent avec lui et Bowie lui rend visite deux fois par semaine. Ils composent ensemble. Kizilçay a un effet d'explosion dans un de ses morceaux et comme Murukami a commandé 4 chansons de Bowie pour son film, David demande à Erdal si il peut utiliser son explosion pour s'inspirer de ce qu'il écrit. 

Avec lui, il est invité en studio pour le prochain effort d'Iggy Pop que Bowie a aidé à resigner avec une maison de disque. Sur 10 morceaux, il co-écrit 7 de ceux-ci avec son ami Pop. Une de celle-ci est aussi co-écrite avec le guitariste des Sex Pistols Steve Jones. Jones co-écrit deux autres morceaux avec Pop et reste guitariste pour tout l'album. Partageant le travail avec Kevin Armstrong. Bowie invite David Richards à produire tout ça avec eux. Erdal est aux synthés, à la base et à la batterie.  La dixième chanson est The Wild One reprise de Johnny O'Keefe et rebaptisée Real Wild Child. L'album sera un bon calcul commercial pour Iggy qui, avec le temps, le reconnaîtra de moins en moins en parlant d'un album principalement de Bowie et non de lui. Plusieurs des chansons sont d'ailleurs des non retenues des sessions pour Tonight, retravaillées. L'album est une fusion de la rage classique d'Iggy du son de cabaret de Bowie et d'une inattendue vulnérabilité romantique. Seul Real Wild Child sera un hit modeste, mais les ventes sont très bonnes, au Canada entre autre où il vendra plus de 500 000 fois. Une tournée pour Iggy suivra et lui remplira un peu les poches favorablement. 

Bowie, incertain de l'identité de ceux à qui il s'adresse maintenant, se sent absolument débutant partout. Même l'acteur Mickey Rourke l'a appelé voulant faire quelque chose avec lui. Bowie est père d'un adolescent dans le plus crunchy de l'adolescence. Joey a 15 ans et les cheveux bleus. Ironique de savoir que David lui pique une crise ne voulant pas qu'il sorte ainsi en public. Ziggy Stardust condamnant la différence ? Really ?  Il peint beaucoup à Vevey, maison qu'autrefois, il méprisait. Il sait qu'il a changé. Son public aussi. Mais il est incertain de la direction des vents. Qu'il ne semble plus complètement savoir lire.

Il les observe, les étudie au lieu de les inventer. 

À cette époque, je revisite tout Bowie de 1967 à 1985. Grâce à mon voisin d'en face qui a tout en 33 tours. Je baigne dans ses multiples univers. Je n'ai pas encore acheté ma première cassette de mon artiste préféré. Mais j'ai tout doublé sur des cassettes vierges. J'ai mon premier (et unique) 33 tours de Duran Duran, Arena. Dont je ne réalise pas tout de suite que c'est un album en spectacle. J'ai 13 ans. Je voudrai les 20 ans des gars de Duran Duran, mais l'audace de Bowie. 

J'aurai pas mal les deux. Dans une envergure modeste. J'ai été chanceux avec les Femmes. Je crois aussi avoir du flair.

Bowie est surstimulé par Erdal Kizilçay. Ce multi-instrumentiste principalement jazz peut passer du violon à la trompette, au corps français et au xylophone en finissant à le percussion atterrissant en faisant du Beatles. 

Il peut produire alors tous les sons.

Bowie a encore de la vision. 

Il est loin d'avoir fini de joindre les deux.  

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